Time to teach. Uganda
Construire des systèmes éducatifs transformateurs grâce à l’élaboration d’une politique holistique à l’égard des enseignants : les leçons de l’Afrique subsaharienne
Ce blog a été rédigé par le professeur Yusuf Sayed à l’occasion du lancement du rapport conjoint de l’UNESCO et de l’Équipe spéciale sur les enseignants,Soutenir les enseignants par l’élaboration de politiques.Leçons de l’Afrique subsaharienne, lors de la 10e Conférence sur l’enseignement et l’apprentissage de la Fédération africaine des autorités de régulation de l’enseignement (AFTRA) et de la 12e table ronde en Namibie, 9-12 mai 2023.
Le Sommet sur la transformation de l’éducation a souligné que pour mettre en place une éducation plus résiliente et transformatrice, les pays doivent s’attaquer à un certain nombre de problèmes concernant les enseignants, notamment les pénuries de personnel qualifié, les possibilités limitées en matière d’éducation et de formation, le statut professionnel inférieur, les conditions de travail inadéquates et les limites à leur autonomisation et à leur capacité d’innovation. Mais alors que ces questions sont au cœur des préoccupations de nombreux décideurs politiques, la pénurie d’enseignants ne cesse de s’aggraver. L’Afrique subsaharienne doit recruter près de 16,5 millions d’enseignants pour parvenir à une scolarisation universelle dans le primaire et le secondaire. En outre, une minorité substantielle d’enseignants n’a eu qu’un accès limité à la formation ou aux possibilités d’améliorer leurs compétences, et seuls 69 % des enseignants du primaire et 61 % des enseignants du secondaire possèdent les qualifications minimales requises dans la région. Les conditions de travail, les salaires et les positions contractuelles des enseignants sont inadéquats, et leur participation à la formulation des politiques est limitée. Dans 20 pays d’Afrique subsaharienne, les enseignants du primaire gagnent en moyenne moins de 7 500 dollars PPA par an.
La politique à l’égard des enseignants est essentielle à la réalisation des ODD
La cible 4.c des objectifs de développement durable engage le monde à : « D’ici à 2030, accroître considérablement le nombre d’enseignants qualifiés, notamment au moyen de la coopération internationale pour la formation d’enseignants dans les pays en développement, surtout dans les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement ». Cela souligne le fait que l’on comprend de plus en plus que des enseignants de qualité, capables d’enseigner efficacement, sont nécessaires pour garantir un apprentissage tout au long de la vie inclusif, équitable et de qualité pour tous. De nombreuses politiques régionales aboutissent à la même conclusion, notamment la Stratégie continentale de l’éducation pour l’Afrique de l’Union africaine (UA-CESA) 2016-2025, l’Agenda 2063 pour l’Afrique et le Cadre de compétences des enseignants d’Asie du Sud-Est.
L’élaboration de politiques nationales holistiques et globales concernant les enseignants est essentielle pour atteindre ces objectifs et aider les enseignants à jouer leur rôle dans la construction d’un monde plus durable. À cette fin, l’Équipe spéciale sur les enseignants et l’UNESCO ont élaboré conjointement le Guide pour l’élaboration d’une politique enseignante afin d’aider les décideurs et les praticiens nationaux à élaborer des politiques holistiques, globales et intégrées pour les enseignants, qui tiennent compte de toutes les dimensions de leur travail et de leurs pratiques. Le guide préconise une approche systémique à long terme, ainsi qu’un examen et une réflexion continus afin d’améliorer en permanence et d’aligner la politique relative aux enseignants sur le paysage politique plus large, y compris les plans du secteur de l’éducation, les perspectives intersectorielles et les objectifs nationaux.
Ce guide a déjà été utilisé dans toute l’Afrique subsaharienne pour élaborer une politique efficace à l’égard des enseignants. Soutenir les enseignants par l’élaboration de politiques. Leçons de l’Afrique subsaharienne examine ces progrès afin de mettre en évidence les enseignements, les bonnes pratiques et les recommandations que d’autres pays peuvent appliquer. Les pays participants étaient le Bénin, le Burkina Faso, le Ghana, la Guinée, le Lesotho, Madagascar, le Malawi, le Togo et l’Ouganda.
Élaborer des processus d’élaboration des politiques structurés et inclusifs
Le processus d’élaboration de la politique est essentiel à son succès. L’étude souligne l’importance d’utiliser des cadres de collaboration pour élaborer des politiques, sur la base d’un large éventail de perspectives et de voix, y compris celles des commissions de la fonction publique et du service des enseignants, des établissements de formation des enseignants, des responsables régionaux de l’éducation et des inspecteurs. La prise en compte de la voix des enseignants s’est avérée essentielle ; les cadres qui mettent l’accent sur le dialogue social et qui font appel aux enseignants et à leurs représentants ont contribué à garantir l’adhésion des enseignants.
Dans tous les pays, une structure de comité à deux niveaux s’est avérée efficace pour gérer les processus d’élaboration des politiques. Un comité directeur composé d’une équipe centrale de décideurs de haut niveau a assuré l’orientation stratégique et la supervision, tandis qu’un comité technique, relevant du comité directeur, était responsable du travail d’élaboration au jour le jour. Ce système a permis de s’assurer que les processus étaient perçus comme inclusifs et transparents, avec une participation significative des parties prenantes tout au long du processus.
Utilisation du Guide pour l’élaboration d’une politique enseignante pour éclairer le contenu
Le guide a servi à éclairer le contenu des politiques nationales relatives aux enseignants et a été jugé facile à mettre en œuvre, pratique et pertinent. Ainsi que le recommande le guide, les pays ont lié la vision de la politique relative aux enseignants aux politiques et plans globaux en matière d’éducation et aux cadres nationaux de développement social et macroéconomique. Tous les pays ont inclus dans leurs politiques les neuf dimensions clés du guide : le recrutement et le maintien des enseignants ; leur formation ; leur déploiement ; les structures de carrière ; l’emploi et les conditions de travail des enseignants ; la récompense et la rémunération des enseignants ; les normes applicables aux enseignants ; la responsabilisation des enseignants ; et la gouvernance des établissements scolaires. Chaque pays a adapté les dimensions à son propre contexte, en les organisant différemment autour d’axes stratégiques thématiques nationaux déterminés par un processus de réflexion et de collaboration. Certains pays ont constaté qu’ils avaient des besoins supplémentaires en matière d’élaboration de politiques, ce qui a entraîné le développement de nouvelles dimensions, telles que le dialogue social et l’autonomie des enseignants, ainsi que des thèmes transversaux tels que l’inclusion et le genre.
Enseignements pour les partenaires dans l’élaboration
L’examen a montré que les partenaires dans l’élaboration, y compris les organisations internationales, les agences d’aide bilatérale et les organisations de la société civile, peuvent jouer un rôle essentiel en aidant les pays à élaborer leurs politiques, en fournissant un soutien financier et technique et en contribuant à la coordination. Les agences internationales peuvent également contribuer à la mise en place d’instances internationales et de plates-formes en ligne pour l’apprentissage et le partage des politiques, permettant aux pays d’apprendre les uns des autres et d’adapter les réponses politiques à leurs contextes nationaux. Les initiatives en cours, telles que les programmes de renforcement des capacités des enseignants, des chefs d’établissement et des autres personnels de l’éducation, peuvent également fournir des enseignements précieux pour l’élaboration des politiques.
Une politique holistique à l’égard des enseignants : un levier essentiel pour transformer l’éducation
Les enseignants peuvent changer le monde, mais ils ont besoin d’aide pour y parvenir. La réforme de la politique de l’éducation doit placer les enseignants en son cœur et, comme indiqué dans les recommandations finales sur les enseignants lors du Sommet sur la transformation de l’éducation, des politiques holistiques pour les enseignants doivent être créées, les enseignants jouant un rôle central dans l’élaboration des politiques et la prise de décision en matière d’éducation par le biais du dialogue social. Ces politiques peuvent offrir aux enseignants de meilleures conditions de travail et le soutien dont ils ont besoin pour offrir des expériences d’apprentissage équitables à tous les apprenants, y compris ceux qui sont marginalisés et défavorisés. Cependant, pour que cela se produise, il faut également améliorer le financement des enseignants grâce à des stratégies de réforme nationales intégrées et à une gouvernance fonctionnelle efficace, si l’on veut que l’éducation se transforme réellement et que les objectifs durables soient atteints.
Consultez le rapport de l’UNESCO/l’Équipe spéciale sur les enseignants : Soutenir les enseignants par l’élaboration de politiques. Leçons de l’Afrique subsaharienne.
Crédit photo : Kehinde Olufemi Akinbo
Politique enseignante nationale : République de l’Ouganda
Améliorer le soutien aux enseignants et la participation aux groupes d’éducation locaux
#LesEnseignantsTransforment les espaces d’apprentissage : Comment les enseignants ont produit un programme télévisé pour aider les apprenants pendant le confinement
« La pandémie nous a montré que nous devions être adaptables et prendre la vie telle qu’elle se présente. S’il veut rester pertinent, le système éducatif doit évoluer. »
Lorsque la pandémie de COVID-19 a frappé, différents pays ont alors imposé des mesures de confinement, et les enseignants ont dû improviser rapidement des solutions d’apprentissage à distance les plus inclusives et accessibles possible.
C’était par exemple le cas des enseignants de l’école primaire Clarke Junior School en Ouganda, qui ont d’abord tenté de poursuivre les cours sur WhatsApp et imprimaient des dossiers que les parents pouvaient récupérer à l’école.
Lorsqu’ils ont réalisé que le confinement allait continuer plusieurs mois, les enseignants passionnés ont cherché un moyen ludique et interactif d’aider leurs élèves en toute sécurité. Ils ont alors décidé de diffuser leurs cours à la télévision locale.
« C’est notre Directrice, Katherine Tucker, qui a eu cette idée », déclare Nyangoma Mugadu, responsable du programme d’apprentissage à la Clarke Junior School. Elle est également spécialiste en éducation pour le programme N*Gen (Prononcé [N gine] comme « moteur » en anglais) de TV Africa depuis son apparition dans l’émission.
« La pandémie nous a obligés à innover et à nous adapter à l’évolution des circonstances. Aucun de nous n’étions des acteurs, nous ne connaissions pas les techniques de diffusion et nous ne savions pas nous présenter devant une caméra, mais nous voulions progresser, rester pertinents et garantir la continuité pédagogique. »
Travailler ensemble à la transformation des espaces d’apprentissage
Pendant la pandémie, il n’y avait pas de service de transports publics. Les enseignants devaient donc parcourir de longues distances à pieds tous les jours pour se rendre à l’école afin de filmer les leçons.
« Nous avons réfléchi ensemble, avec la contribution de la Directrice, afin d’élaborer le contenu des leçons. Le tout était filmé par une toute petite équipe et diffusé sur la chaîne locale de télévision. »
Le contenu créé par l’école a attiré l’attention de Peripheral Vision International, une ONG dont le but est de contribuer au changement social à travers les médias, les technologies et la culture populaire. L’organisation a contacté les enseignants et leur a proposé de collaborer dans le cadre d’une émission scientifique panafricaine visant à susciter l’intérêt des enfants pour les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques (STIM).
« Au départ, il s’agissait d’un contenu limité à la lecture, aux mathématiques et aux thèmes sociaux. Lorsque nous avons commencé à travailler avec Peripheral Vision International, la science est devenue le thème principal, jugée plus importante, pertinente et attrayante », se souvient Irene.
N*Gen est passé d’un petit programme à la télévision locale ougandaise lancé en septembre 2020 à une émission populaire diffusée sur 45 chaînes africaines. Elle est également disponible sur la chaîne africaine aux États-Unis et dans les Caraïbes. La troisième saison est en cours de réalisation.
Pendant la pandémie, les enseignants de la Clarke Junior School ont présenté tous les épisodes et ont participé à leur élaboration. « Nous avons présenté des expériences pouvant être reproduites par les enfants à la maison », explique Irene, qui apporte encore ses conseils à l’émission en tant que spécialiste de l’éducation.
« Nous avons également fait participer nos propres enfants pour réaliser les expériences. Des enfants qui enseignent aux enfants, c’est devenu l’une des caractéristiques de N*Gen, appréciée par nos téléspectateurs. »
Transformer l’apprentissage en encourageant la participation et les expériences
Les écoles ont utilisé les épisodes de N*Gen en complément de leurs programmes d’apprentissage à distance.
« Notre but était de rendre l’apprentissage ludique et de stimuler la curiosité et les découvertes. Les épisodes ciblaient les apprenants du primaire de tous âges. Chaque épisode s’appuyait donc sur un thème donné, destiné à toute la famille afin de permettre aux enfants d’apprendre ensemble. Nous avons ensuite élaboré des modules pédagogiques en fonction des niveaux, qui comprenaient des questions à poser à chaque enfant pour qu’il puisse approfondir ses connaissances sous forme de conversation. Dans la mesure du possible, nous y ajoutions des expériences et des questions de recherche, ainsi que des exercices de rédaction, indique Irene. Par exemple, nous avons saisi l’occasion de l’épisode portant sur les montagnes et les volcans pour montrer la réaction entre le vinaigre et le bicarbonate de soude afin de représenter une éruption volcanique. Tous les enfants de la famille pouvaient créer ensemble leur propre expérience scientifique à la maison, puis réaliser les exercices individuels adaptés à leur niveau. »
Une version adaptée de l’apprentissage de groupe a ainsi pu avoir lieu malgré la pandémie.
Une étude a montré que pour un même contenu, les élèves qui apprennent en petit groupe en retiennent davantage que lorsqu’il est présenté sous d’autres formes.
Retour en classe et nouvelles perspectives
Depuis la réouverture des écoles, les enseignants de la Clarke Junior School sont de retour en classe et une nouvelle équipe se charge de présenter N*Gen.
« Le programme N*Gen était axé sur la création d’une expérience d’apprentissage attrayante et interactive, que je reproduis aujourd’hui en classe. J’applique le programme local de manière pratique afin de stimuler les élèves.
Dans notre école, nous faisons de notre mieux pour éviter l’apprentissage par cœur. Nous sommes convaincus que toutes les matières peuvent être enseignées de manière ludique et interactive. Nous avons également recours aux jeux pour renforcer l’intérêt pour les STIM, qui peuvent parfois sembler difficiles. »
Le soutien aux apprenants et aux enseignants doit évoluer
« Dans notre école, nous nous posons la question “À quel monde préparons-nous nos enfants ? De quelles compétences auront-ils besoin à l’avenir dans leur carrière ?” Nous devons transmettre à nos élèves des compétences plus générales telles que la créativité, la gentillesse, l’appréciation de la nature, le leadership et la communication interpersonnelle », explique Irene.
Afin d’atteindre les objectifs de développement durable, notamment l’objectif 4, les apprenants doivent acquérir des compétences en lecture et en calcul, ainsi que les connaissances, compétences, valeurs, mentalités et comportements nécessaires pour construire des sociétés justes, pacifiques et durables.
Selon l’UNESCO, il est essentiel pour cela de garantir que les systèmes éducatifs encouragent la compréhension mutuelle, le respect, le souci des autres et la protection de la planète que nous partageons. Cela permettra de renforcer la capacité des apprenants à agir de manière responsable et créative dans un monde en constante (et rapide) évolution.
« Les technologies favorisant l’intégration ont un grand potentiel pour améliorer les questions d’accès, notamment en Afrique subsaharienne, mais nous devons former les enseignants afin qu’ils disposent des compétences nécessaires aux approches d’enseignement multimédia dans les classes, pour que l’éducation puisse évoluer et être en phase avec son époque. »
Apprenez-en plus sur la campagne #LesEnseignantsTransforment lors du Sommet sur la transformation de l’éducation.
Photo credit: Irene Nyangoma Mugadu
Cette émission radiophonique en Ouganda incite les enseignants à prendre des risques et à essayer de nouvelles idées
Ce blog est animé par STiR Education Ouganda dans le cadre du 13ème Forum de dialogue politique sur l’innovation dans les politiques et les pratiques enseignantes au service du redressement de l’éducation, qui se a eu lieu les 2 et 3 décembre à Kigali (Rwanda), et en ligne.
La pandémie de COVID-19 représente un énorme défi pour le système éducatif ougandais. Une année de fermetures d’écoles a bouleversé la vie de 10,2 millions d’enfants et de 200 000 enseignants.
La réponse initiale du pays à cette situation a principalement consisté à garantir la continuité de l’apprentissage pour tous les enfants. Cependant, les enseignants n’ont pas été impliqués dans ce processus, ce qui a vraisemblablement rendu leur soutien aux élèves moins efficace une fois les écoles rouvertes.
Les fermetures d’écoles pendant la pandémie ont également eu d’autres répercussions sur les enseignants. La COVID-19 a causé à de nombreux enseignants un stress social et émotionnel, en raison du manque de clarté entourant leurs obligations et la manière dont ils peuvent rester en contact avec les élèves pour les aider dans leur apprentissage.
Prendre la parole sur les ondes
STiR Education, une ONG internationale qui s’efforce de remotiver les enseignants et les responsables de l’éducation, a proposé une solution innovante pour l’Ouganda, qui a permis d’atténuer les répercussions de la COVID-19 sur les enseignants et le système éducatif dans son ensemble, et de les préparer à retourner à l’école.
STiR a travaillé en étroite collaboration avec de hauts fonctionnaires du ministère de l’Éducation et des Sports du pays pour mettre au point un programme radiophonique de développement professionnel continu destiné aux enseignants. Il s’agissait d’une session de 30 minutes diffusée à la radio nationale et locale toutes les deux semaines.
Les sessions étaient basées sur des stratégies d’enseignement simples mais efficaces, fondées sur des données probantes, pour aider tous les enseignants à progresser et à améliorer leur pratique. Chaque leçon était accompagnée d’un document d’une page ou d’une infographie partagée sur WhatsApp pour enrichir le contenu. STiR a également partagé les enregistrements de chaque émission avec les responsables afin qu’ils puissent les transmettre aux enseignants. De cette manière, l’ONG a veillé à ce que le plus grand nombre possible d’enseignants puissent s’intéresser au contenu.
STiR a cependant reconnu qu’il n’était pas suffisant de n’impliquer que les enseignants dans ce processus. L’ONG a donc mis en place des séances hebdomadaires d’accompagnement individualisé avec les responsables de district, dans le but de les aider à animer des conférences téléphoniques bimensuelles avec de petits groupes de chefs d’établissement afin d’examiner le contenu des leçons radiophoniques et d’élaborer des plans pour les enseignants qu’ils soutenaient. Les émissions ont ainsi touché un maximum de personnes, et cela a permis de mobiliser durablement l’ensemble du système éducatif.
Raviver la motivation
L’organisation affirme que les résultats de cette innovation ont été positifs. Les leçons radiophoniques ont inspiré les enseignants et les ont encouragés à prendre des mesures pour améliorer leur enseignement, tandis que les supports de suivi partagés sur WhatsApp ont encore renforcé leur développement professionnel.
Selon STiR, la radio présente un énorme potentiel de diffusion de l’enseignement professionnel pour les enseignants en période de fermeture des écoles et de restrictions des déplacements.
Les enseignants du programme ont appris à croire en leur capacité à créer le changement. Ils ont cultivé un état d’esprit de perfectionnement, ont appris et promu des pratiques sûres concernant la COVID-19 et ont comblé des lacunes relatives à leurs propres pratiques d’enseignement, et ce, tout en se préparant émotionnellement à leur retour dans les écoles.
Apprendre à combler des lacunes par l’enseignement
STiR Education a été heureuse d’apprendre que certains chefs d’établissement ont acheté des radios pour les salles du personnel afin de renforcer la mobilisation des enseignants. L’organisation indique qu’elle s’est également efforcée de trouver des moyens de partager des témoignages d’enseignants qui ont trouvé ces contenus radiophoniques particulièrement utiles. Par exemple, certains enseignants se réunissent en petits groupes, écoutent la leçon, puis appellent pour dire comment ils prévoient de soutenir les apprenants dans la communauté en vue de la réouverture des écoles.
Cette année, dans ses émissions, STiR a porté une attention particulière au bien-être psychosocial et socio-émotionnel des enseignants. En vue d’améliorer l’apprentissage à grande échelle de manière durable et équitable dans un monde en rapide mutation, il est possible de renforcer la résilience émotionnelle des enseignants en favorisant les sentiments de sécurité, de confiance envers les autres, d’estime de soi et d’espoir pour l’avenir.
Un juste milieu
La radio s’est avérée être un moyen rentable de diffuser des contenus de formation des enseignants dans les 40 districts et municipalités (et au-delà) dans lesquelles STiR intervient. Grâce à cette innovation, STiR a également réussi à atteindre des enseignants en dehors de ses districts d’intervention dans l’est, le centre et le nord de l’Ouganda.
Toutefois, STiR précise que tout n’a pas été facile. L’ONG s’est heurtée à deux obstacles majeurs : tout d’abord, la couverture inégale du réseau mobile a nui à la qualité des conférences téléphoniques des chefs d’établissement. L’équipe de STiR a essayé de remédier à ce problème en programmant les appels à l’avance afin que les dirigeants s’assurent de se trouver dans un endroit où la réception du réseau est bonne. Le partage de contenu via WhatsApp a également contribué à atténuer ce problème.
Deuxièmement, cette approche offrait aux enseignants peu de possibilités de collaborer et de partager des plans de développement professionnel. En réponse, STiR a proposé aux enseignants d’appeler à la fin de chaque leçon pour faire part de leurs commentaires et recevoir un retour sur leurs plans de la part de leurs collègues. STiR remarque que cela a créé un sens de la communauté et a aidé les enseignants à acquérir la confiance nécessaire pour collaborer et échanger leurs commentaires.
Pour l’avenir, l’équipe de STiR reconnaît qu’il est essentiel que la formation radiophonique réponde aux besoins psychosociaux et pédagogiques des enseignants afin qu’ils puissent, à leur tour, aider ceux à qui ils enseignent à acquérir des compétences et des connaissances, à adhérer à des valeurs et à adopter certaines attitudes. Cela peut être réalisé par des activités qui améliorent le bien-être émotionnel des enseignants ainsi que leur pratique pédagogique.
La pandémie a sans aucun doute posé de multiples défis à l’éducation dans le monde entier. L’innovation sera déterminante pour accélérer la reprise de l’éducation. STiR déclare : « Nous sommes fiers de contribuer au développement professionnel continu des enseignants en Ouganda via des émissions de radio, WhatsApp et des appels d’accompagnement professionnel individualisé hebdomadaires, notamment dans la mesure où cette initiative sera bénéfique aux personnes qui ont le plus besoin de notre aide et de notre soutien : nos écoliers. »
STiR Education participe au Forum de dialogue politique de cette année. Pour en savoir plus sur l’événement, cliquez ici.
Les désignations employées dans cette publication et la présentation des données qui y figurent n’impliquent de la part de l’UNESCO ou de l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants pour Éducation 2030 aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. Les idées et les opinions exprimées dans cette publication sont celles des auteurs ; elles ne reflètent pas nécessairement les points de vue de l’UNESCO et n’engagent en aucune façon l’Organisation.
Crédit photo : STiR Education Ouganda
Élaboration d’une politique enseignante adaptée aux situations de crise : webinaire et consultation internationale
Face à l’augmentation des perturbations et des crises mondiales, il ne sera pas possible de garantir une éducation de qualité inclusive et équitable pour tous d’ici 2030 ( ODD 4) si la planification de l’éducation n’est pas adaptée aux situations de crise. Les enseignants, qui sont le facteur le plus important au sein de l’établissement scolaire pour influencer les résultats de l’élève, sont souvent en première ligne dans les situations de crise. C’est pourquoi il est impératif de donner la priorité aux enseignants, de les soutenir et de les protéger par le biais d’une politique et d’une planification de l’éducation adéquates.
En s’appuyant sur la Note d’orientation sur l’élaboration d’une politique enseignante adaptée aux situations de crise élaborée conjointement par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), l’Organisation internationale du Travail (OIT) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) en 2020 dans le cadre de l’Initiative norvégienne pour les enseignants (NTI), le webinaire sur les politiques enseignantes et la planification adaptées aux situations d’urgence et de déplacement qui s’est tenu le 16 septembre, a réuni des experts politiques, des représentants de pays et des enseignants pour mettre en évidence ce qui est nécessaire pour garantir une politique enseignante adaptée aux situations de crise.
Au cours d’une discussion qui a abordé les principaux aspects stratégiques du guide, les participants ont partagé les enseignements tirés des crises précédentes et actuelles, ont discuté du rôle des enseignants dans les contextes d’urgence et de déplacement, et ont plaidé pour un soutien accru des enseignants dans ces contextes.
Les déplacements créent des difficultés pour le recrutement, la formation et le déploiement des enseignants
Si la COVID-19 a mis en lumière, à l’échelle mondiale, les difficultés auxquelles les enseignants sont confrontés lorsque la scolarité est perturbée, cette pandémie n’est qu’une des nombreuses situations de crise qui remettent en cause la continuité et la qualité de l’éducation à travers le monde. Selon le HCR (2021), fin 2020, 82,4 millions de personnes ont été déplacées de force en raison de conflits violents, de persécutions et de catastrophes naturelles.
Mme Angéline Neya Donbwa, secrétaire technique de l’Éducation en situation d’urgence au Burkina Faso, a fait écho au constat de Mme Alezuyo. Elle a ajouté qu’avec plus de 1,4 million de personnes déplacées et 2 444 écoles fermées au sein de son pays, le redéploiement d’enseignants depuis des zones ravagées par les conflits vers des villages déjà surpeuplés dans des zones plus sûres, représentait une difficulté majeure. Grace*, une enseignante déplacée originaire elle aussi du Burkina Faso, s’est exprimée sur les défis que pose l’enseignement à des enfants traumatisés. Elle a expliqué que certains de ses élèves rencontraient des difficultés à se concentrer en classe, avaient peur, ou réagissaient de manière agressive ou violente. Elle a également noté qu’au sein de sa classe, elle devait répondre non seulement aux besoins des enfants déplacés, mais aussi à ceux des enfants de la communauté du pays d’accueil.
Un soutien psychosocial et financier est primordial pour les élèves comme pour les enseignants
Un soutien psychosocial apparaît comme une dimension importante de la planification adaptée aux situations de crise. Mme Neya Donbwa a expliqué que la nécessité de recevoir cette forme de soutien avait été clairement exprimée par les communautés affectées par l’insécurité et la violence au sein de son pays. En plus d’avoir eux-mêmes besoin de soutien pour répondre aux épisodes traumatiques, les enseignants ont besoin de pouvoir faire face aux effets physiques et émotionnels de la crise sur leurs élèves. C’est ce qui a conduit l’équipe de Mme Neya Donbwa à élaborer un module pour faire face aux situations traumatiques. Ce dernier vient compléter leur formation « Safe Schools » (Écoles sûres), conçue pour préparer les enseignants aux situations de crises.
En outre, la stabilité financière des enseignants est souvent mise à mal lors de situations de crises et d’urgence. Mme Neya Donbwa a expliqué que continuer à verser un salaire aux enseignants ayant dû fuir une zone à risques était l’une des dispositions de leur stratégie de gestion des enseignants en temps de crise. De même, Mme Alezuyo a précisé qu’en temps de crise en Ouganda, les enseignants des établissements publics avaient continué à recevoir leur salaire jusqu’à leur redéploiement. Cela n’était toutefois pas le cas des enseignants des écoles privées pendant la crise de la COVID-19, comme l’a souligné Mme Stella Turehe, une enseignante ougandaise. Mme Turehe a indiqué que les pressions financières auxquelles les écoles privées avaient été confrontées pendant cette crise avaient entraîné la fermeture de nombreuses écoles et la perte d’emploi d’enseignants.
Le respect des mesures sanitaires demande de la flexibilité et de l’innovation
Le respect des mesures sanitaires de lutte contre la COVID-19 s’est également montré difficile pour les écoles et a parfois conduit à leur fermeture complète. En Ouganda, les mesures émises par le ministère de la Santé ont limité à 20 le nombre d’élèves par enseignant. Selon Mme Turehe, les écoles des camps de réfugiés — qui ont un taux d’inscription élevé — ont eu du mal à rouvrir. Cependant, en réponse à ces mesures, des enseignants ont mis en place un certain nombre d’actions avec le soutien d’organisations non gouvernementales, parmi lesquelles la création d’un système de double vacation pour permettre la réouverture des écoles, la promotion de l’apprentissage en ligne par le biais de tablettes, et de l’apprentissage en groupe dans les communautés d’étudiants réfugiés.
De plus, les enseignants ont également fait preuve d’innovation pour soutenir l’ensemble de la communauté scolaire pendant la crise de la COVID-19 en Ouganda. Ils ont organisé des campagnes promouvant le retour à l’école, mis en place des comités pour établir des liens avec les apprenants et les parents, créé des clubs d’étudiants et offert des conseils aux adolescents.
L’importance des mécanismes de communication et de consultation
Les mécanismes de communication et de retour d’information des enseignants sont essentiels afin de s’assurer que les décideurs politiques sont suffisamment informés des conditions en évolution constante qui caractérisent les situations de crise. Mme Alezuyo a expliqué qu’il existe différents niveaux de communication entre les décideurs politiques, les enseignants et les communautés de son pays. Elle a précisé de quelle manière ces niveaux sont propices à la planification d’une éducation adaptée aux situations de crise. Le système d’information sur la gestion des enseignants recense les niveaux de formation et d’expérience, ce qui facilite le déploiement des enseignants et une planification efficace pendant les crises. La communication au niveau de l’établissement scolaire et de la communauté s’est adaptée, y compris par le biais de téléphones portables, de radios et de plateformes de réseaux sociaux.
Consultation pour un nouveau module sur la politique enseignante adaptée aux situations de crise.
Le webinaire a par ailleurs lancé une consultation internationale afin de développer un nouveau module sur la politique enseignante et la planification adaptées aux situations de crise qui vient compléter le Guide pour l’élaboration d’une politique enseignante rédigé par l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants pour Éducation 2030.
Le projet de module est disponible pour commentaires et suggestions d’études de cas au lien ci-dessous.
https://docs.google.com/document/d/1NC8h2fNfjYj3CxSI2jkQWOYjy2v5Zz1N/edit
Veuillez envoyer vos commentaires et suggestions avant le 1er octobre à sm.richter@unesco.org.
*Pour des raisons de sécurité, ce nom a été modifié.
Crédit photo : HCR/Eduardo Soteras